Démarche artistique
La trace
Il y a deux expériences fondatrices de mon travail :
- mon questionnement enfantin sur l'autre côté du miroir ;
- mon trouble et mon angoisse, adolescente, devant la fente, ténue, d'un sarcophage égyptien .
Et cette question, toujours : que se passe-t-il quand nous ne sommes pas/plus là ?
Le regard s'arrête-t-il à la seule surface de l'œuvre ?
Je travaille en m'attachant à ce qui me regarde. Je cherche à relever le derrière des choses.
Mais d'abord quelle chose : la figure humaine et son effacement.
L'exploitation de la vulnérabilité de cette navigation entre l'éveil et l'endormissement, l'absence et la présence.
Plastiquement, je recherche la rupture dans la texture, la destruction de la surface initiale du stuc très lisse, la disparition de la face sous les scories du plâtre. Ce sont autant d'arrêt pour le regard, de possibilité de cheminer. Imposer l'intimité avec le spectateur. Pour que, d'après Paul Klee, la formation apparaisse sous la forme . Que l’œuvre fasse « co-présence » avec celle du créateur, ou celle que le regardeur y mettra. La disparition de la face laisse place à un monde de possible.
Les gens de la Marche est une série inspirée des gravures préhistoriques (des profils de personnes ayant vécues il y a 18 000 ans) dans laquelle j'ai voulu reconstruire leurs faces, puis les effacer comme un jeu de traces pour m'inscrire dans une lignée.
La série, archéologie de l'enfance, s'est faite autour du recouvrement de peluches et de jouets, d'objets « transitionnels » non investis par des enfants. Des objets neutres dans le sens où ils n'ont pas eu d'histoire ( objets de marketing ) que j'ai recouvert jusqu'à les humaniser, puis jusqu'à les dissimuler. Véritable mise en boîte d'objets, eux-même destinés à contenir et apprivoiser l'absence.
Par delà la forme initiale,
La trace comme acte de présence. La ténuité comme espace de possibilité.